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Quelle langue intégrer aux côtés de l’anglais dans la CARICOM: le français ou le créole?

Dernière mise à jour : 31 oct.

Dans son discours du 1er juillet 2011, à la 32ème réunion ordinaire de la conférence des chefs d’État et de gouvernement de la CARICOM, le Président de la République d’Haïti, Monsieur Joseph Michel Martelly, a fait la proposition d’intégrer la langue française dans cette organisation régionale. Voilà les propos exacts du Président à ce sujet: « […] je recommande au Groupe de Travail Intergouvernemental sur la Révision du Traité de Chaguaramas d’ajouter à son agenda la question de la diversité linguistique au sein de notre communauté et de l’intégration du français comme langue officielle et de travail au niveau du Secrétariat et des autres instances de la CARICOM ». Puisque c’est l’État haïtien qui préside actuellement la Communauté jusqu’en juin 2013, le Président Martelly est, de fait, bien placé pour faire avancer son dossier d’inclusion du français aux côtés de l’anglais.


Cette curieuse initiative de la Présidence suscite naturellement la réaction de plusieurs individus et institutions concernés par la question linguistique en Haïti et par l’importance croissante du créole dans la région caribéenne. Dans une lettre ouverte, datée du 3 janvier 2013, adressée au gouvernement haïtien, Le Rectorat de l’Université d’État d’Haïti (UEH) et le Comité pour la création de l’Académie du créole haïtien n’ont pas manqué d’exprimer leurs inquiétudes par rapport à la décision du Président Martelly d’opter pour le français plutôt que pour le créole haïtien comme deuxième langue officielle de la CARICOM. Dans cette lettre, écrite d’ailleurs en créole haïtien, le comité avance toute une série d’arguments pertinents démontrant clairement pourquoi le choix du créole est plus judicieux que celui du français dans l’espace de la CARICOM.


Le premier argument avancé dans la lettre est introduit par la question suivante: « adopter le francais comme langue officielle de la CARICOM, pour quelle population, quel public? ». Il suffit d’un minimum de bon sens pour comprendre que le français ne saurait en aucune façon contribuer à renforcer les liens interétatiques entre les états membres de la CARICOM dans lesquels celui-ci représente une langue étrangère. De tous ces états, Haïti est le seul à avoir gardé le français comme langue officielle. Il convient d’ajouter que cette langue, quoique officielle, n’est utilisée en Haïti que dans des situations formelles par une infirme minorité d’Haïtiens, partiellement bilingues, donc incapables, pour la plupart, d’utiliser correctement le français dans toutes les situations de la vie courante. En ce sens, on peut soutenir qu’il n’existe quasiment pas de Francophones réels en Haïti puisque même ceux et celles qui ont excellé dans l’écriture du français, ont en fait le créole comme langue maternelle. En réalité, la minorité bilingue haïtienne est composée en majeure partie de Créolophones qui ont appris le français. Le nombre d’Haïtiens qui ont acquis cette langue au niveau familial est si minime qu’il ne sert à rien d’en tenir compte.


Hormis le Surinam, où le néerlandais est la langue officielle, tous les autres pays de la Communauté Caribéenne ont en commun l’anglais comme langue officielle et un créole à base lexicale anglaise ou française comme langue vernaculaire. C’est d’ailleurs sur ce critère numérique que les quatre pays fondateurs de la CARICOM se sont basés pour initialement faire de l’anglais la langue officielle de la Communauté. Partant du même principe, il est évident que le français n’a aucune place au sein de la CARICOM. Si pour une raison absurde, la proposition du Président Martelly était acceptée et que le français devenait une langue de travail au sein de la CARICOM, avec qui l’infirme minorité d’Haïtiens soi disant francophones parleraient-ils le français dans cet espace? Si l’on se base sur le poids démographique des langues officielles utilisées dans l’espace de la Communauté Caribéenne, le créole haïtien, devrait, en toute logique, être adopté comme la deuxième langue officielle de la CARICOM.



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